A cette période, l’homme ne se contente pas de fabriquer les outils essentiels à sa survie, il décore ses objets et orne les parois de caverne. Dans la Grotte aux chevaux, les témoignages de la présence régulière des hommes sont donc nombreux : aires de séjour, art pariétal, outils, mobilier…..
Leurs séjours semblent se poursuivre sur toute la période du magdalénien moyen (14 000 – 12 000) et perdurer de générations en générations jusqu’à l’abandon de la cavité où les objets ont été laissés en l’état, comme en attente.
Souvent moins emblématique que l’art parietal qui regroupe les signes, peintures et gravures, il est pourtant conséquent et de première importance à Labastide. On peut ne effet, répertorier trois type : les parures, les outils et les plaquettes.
Vidéo : L’homme de cro-magnon : un technicien de genie
De très nombreuses plaquettes gravées ont été découvertes à Labastide sur plusieurs aires. C’est l’une des particularités de ce site. Robert Simonnet recense environ 167 supports minéraux présentant au total 440 gravures structurées : saumons, reptiles, chevaux, oiseaux et bisons… ont été représentés sur des morceaux de schiste ou de calcaire de 20 cm. La plupart de ces plaquettes gravées étaient disposées de façon à constituer une sorte de pavage, leur disposition si particulière, à un endroit bien précis a très certainement un sens qui nous échappe. Certaines de ces plaquettes portent des traces d’encoches suggérant le port par des liens, ce qui leur conféraient peut-être une valeur spécifique, d’autres étaient fichées dans le sol. Concernant l’approvisionnement de ces plaquettes, elles auraient été prélevées en partie dans la grotte et le reste aux abords. |
La Grotte aux Chevaux compte prés de 200 gravures, peintures et points rouges dont certaines sont uniques et exceptionnelles. Ces œuvres sont localisées en différents endroits de la grotte, de l’entrée jusqu’à la Salle Terminale. Cependant, ormis la salle du lion, une grande partie d’entre elles se trouvent au «centre» de la grotte, à 200m de l’entrée, à un changement de direction du parcours. Cet endroit concentre les espaces : « panneau des Lames », « Plate-forme du Diverticule et de la Châtière », « bloc des Bisons », « Pierre noire » et la magnifique peinture du grand Cheval polychrome.
Le cheval et le bison composent les deux tiers du bestiaire représenté. Puis viennent des animaux mystérieux, des bouquetins, des représentations humaines, des félins…
Les œuvres pariétales sont, dans la première partie de la grotte, dispersées en panneaux isolés à thèmes uniques : les chevaux, les bisons. Puis regroupées dans l’espace au « centre » de la grotte ou sur la paroi et la voûte d’une même salle : la salle du Lion. Les deux dernières gravures (oiseau et bison) sont plus isolées.
Longtemps, Labastide a été considérée comme une grotte à gravures exception faite du superbe cheval polychrome qui fit sa renommée. Pourtant, la peinture est présente sur de nombreux panneaux mais les rudes conditions climatiques (surtout dans la première partie) n’en ont pas permis une bonne conservation. Seuls subsistent des traces de colorants.
La gravure est omniprésente, associée parfois à la peinture comme au niveau du grand cheval polychrome ou des bisons, elle est le plus souvent utilisée comme seul élément artistique en traits fins à la limite de la lecture ou en larges raclages.
L’espace le plus emblématique est la salle du lion, où parmi de très nombreuses gravures de chevaux et bisons ressortent des représentations humaines, dont le masque de sorcier et surtout une tête de lion rugissant, gueule ouverte et canines menaçantes. Plus loin, une tête d’oie compte parmi les rares représentations d’oiseaux de la Préhistoire. Il faut aussi citer «la Pierre Noire» qui regroupe des êtres composites, mystérieux. Les hommes ont gravés des figures de toutes tailles. Certains traits similaires par l’outil et la technique laissent penser que certains dessins sont le fait d’un même individu.
L’œuvre la plus remarquable et la mieux conservée de la cavité est le superbe cheval polychrome presque grandeur nature. L’artiste qui l’a réalisé, l’a rendu volontairement spectaculaire, car magnifiquement placé sur un bloc de 4m de hauteur et très colorée.Il est traité en couleurs avec effets de bleu et de blanc par raclage différentiel de la roche, et apport des peintures courantes noire et rouge localement combinées en brun. Cet animal présente de manière assez énigmatique un tracé noir sur les yeux, qui semble mettre en valeur son regard.
Il est mondialement connu de tous les préhistoriens et compte parmi les œuvres majeures de la Préhistoire.
Vidéo: Présentation du cheval polychrome par Robert Simonnet
La couleur rouge est très présente, sous la forme d’ocre déposé sur les parois du diverticule ou au travers de très nombreux marquages, des points rouges qui se répartissent sur la longueur de la cavité. A noter aussi, des empreintes de doigts, des dépots d’objets, des caches ou des os fichés…autant de signes et de symboles.
Quatre aires de séjour témoignent de la présence régulière des hommes. L’industrie lithique et osseuse, les déchets de repas, la présence de foyers et de lampes à graisse, correspondent à des séjours relativement longs. Des os fichés ont été relevés sur trois des aires de séjours. Ces aires d’activités de subsistance sont en contact direct avec des œuvres pariétales, signe de leur implication dans l’ensemble pariétal de la grotte.
La grotte aux chevaux reste un lieu préservé où bien des découvertes attendent les chercheurs.
Le chamanisme est une des hypothèses proposées concernant les usages de la Grotte aux Chevaux au paléolithique.
En 1996, Jean Clottes et D. Lewis Williams établissent une comparaison entre l’art des cavernes européen et les grottes ornées d’Afrique du Sud où cet art est attribué au peuple des Bushmen San à l’occasion de rites dont le Chamane est le personnage central; Il est l’intermédiaire entre le monde des hommes et celui des esprits auquel il accède par la transe.
Le raisonnement se base sur les comportements de sociétés analogues, en l’occurrence ici des peuples de chasseurs-cueilleurs. Un peu partout dans le monde, le milieu souterrain est perçu comme un monde-autre, celui où résident les dieux, les esprits et les morts. Ce sont des lieux chargés de pouvoirs et de dangers surnaturels dont la paroi des grottes est la frontière.
Jean Clottes et D. Lewis Williams vont également mettre en avant le caractère hallucinogène du monde souterrain.
A Labastide, les différentes aires de séjour, les caches dans lesquelles des objets « précieux » furent retrouvés (lames de silex, contours découpés), les nombreux ossements fichés dans les parois, les signes tracés au doigt ont amenés Robert Simonnet à réfléchir à la relation symbolique et rituelle entre l’Homme magdalénien et la Grotte aux Chevaux.
(Robert SIMONNET, 1999 -Les magdaléniens dans les Pyrénées, la grotte de Labastide – espace réel et espace imaginaire- Archéologie des Pyrénées Occidentales
(J. CLOTTES J. & LEWIS-WILLIAMS D., 1996. — Les Chamanes de la Préhistoire. Transe et Magie dans les Grottes ornées. Paris, Le Seuil)
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